extrait de https://artrkl.com/blogs/news/satellite-art
M’ame, c’est nul, c’est en noir et blanc et y a des sous-titres ! » C’était pourtant un bon documentaire sur la dissection des batraciens, conseillé par France 5. On ne vous y reprendra plus ; un film, c’est bien, mais à la maison et dans son fauteuil. Finalement, est-ce qu’un cours sans la vidéo n’aurait pas été plus approprié ? Et plus efficace ? Difficile pourtant de faire sans l’image à l’École quand la vie en est saturée. Comment l’enseignant peut-il travailler avec une plus grande pertinence l’image et le son avec et pour les élèves ?
QUELLE PLACE POUR L’ÉCOLE ?
Nos jeunes sont tout autant enfants des écrans qu’élèves à l’école. Faire comme si cette réalité n’existait pas ne ferait que renforcer le sentiment confus d’une rupture entre l’école et la « vraie vie ». La durée par tranche d’âge est croissante : 2 h 22/jour pour les 5 ans, 2 h 53 pour les 7/10 ans, 3 h 34 /j pour les 11- 14 ans. Un enfant sur quatre dispose d’une télé dans sa chambre, un sur trois possède une tablette
On se trouve en plein paradoxe : si la vie est « tout image », même à l’École, si nombre de matières sont consommatrices, utilisatrices et productrices d’images, l’École survalorise cependant la production écrite alors que le mode de transmission est essentiellement oral. Le divorce est-il consommé ?
REGARDER, CE N’EST PAS VOIR NI COMPRENDRE
Malgré toute leur « culture » audiovisuelle, les élèves ne« voient » pas ce qu’il faut voir.
L’approche quantitative ne suffit pas ; manifestement, ce qui ressort le plus souvent, ce n’est pas la dichotomie image/pas image, mais plutôt la façon de regarder. Il s’agit donc bien d’éducation. Une expérience été menée par Alain Lieury1, un des experts en neuropsychologie sur la mémoire. Il s’agissait de présenter une adaptation d’un documentaire télévisé à des élèves de sixième et de cinquième, selon différentes modalités. Des QCM de mémorisation étaient délivrés après les séances. Lieury livre les scores des profils d’apprentissage selon les modes de présentation du message (voir le tableau page suivante) :
1. ORDP, Résonances, n° 5, janvier 1997.
Type de support Profils d’apprentissage |
Verbal |
Imagé + verbal |
Imagé |
Visuel | Lecture 30 % | Manuel 31 % | Télévision muette 0 % |
Auditif | Cours oral 21 % | Télévision 11 % | – |
Audiovisuel | Cours oral + tableau 21 % | Télévision + sous-titres 20 % | – |
À l’école, l’image ne crée pas de miracle
L’image n’est donc pas magique en termes de performances scolaires, loin de là. Elle affiche des scores comparables à des situations classiques : on apprend aussi en dehors de l’école. Sa singularité n’est pas là. Elle représente un « attracteur étrange » pour les élèves, en ce sens qu’elle les trompe.
- L’image semble offrir un message accessible sans médiation de l’écrit. C’est loin d’être vrai : près de 80 % du message délivré le sont par le commentaire. C’est souvent plus difficile que le cours, dans la mesure où on observe un décalage entre l’image elle-même et le commentaire déjà très condensé.
- L’image est de l’ordre du perçu, non du raisonné ; elle met en jeu un système de sensations et de perceptions non organisées.
- L’image délivre un message sans hiérarchisation, comme pourrait l’être une carte géographique : l’image est polysémique.
Il y a donc bien lieu de participer à l’éducation au regard analytique et à l’outillage intellectuel de l’élève pour lui permettre de décoder le monde.
L’ENSEIGNANT EST UN « ÉDUCOMMUNICATEUR »
Penser ou agir par cloisonnement n’est sans doute pas le meilleur moyen de donner du sens à votre enseignement comme au travail de vos élèves. Si l’image, toutes formes confondues, est partout, il nous faut l’accueillir comme une occasion d’apprendre. Les renouvellements des programmes et les factures des manuels incitent fortement à le faire. Les uns et les autres peuvent conduire à faire évoluer nos pratiques. Geneviève Jacquinot, professeur à l’université Paris 8, n’insiste pas particulièrement sur une nécessaire formation, mais d’abord sur des postulats et sur la com- préhension intelligente d’un phénomène contemporain. Elle esquisse le portrait de l’enseignant en « éducommunicateur », un rôle encore à investir1.
1. Extrait de « (In)novatio 4, les pratiques de l’image à l’École », mars 2003, Paris.
Ce dernier doit :
– être conscient qu’une éducation « de masse » et « multiculturelle » se situe au-delà de l’acquisition des seuls savoirs scolaires ;
– chercher à ne pas dévaloriser la culture médiatique, notamment télévisuelle, des jeunes ou leur spécificité culturelle, mais prendre appui sur elles ;
– voir dans les médias une richesse, par leurs contenus informatifs certes, mais aussi par la façon dont ils donnent une représentation du monde : d’où la nécessité d’analyser et de comparer, voire de rectifier lesdites représentations ;
– considérer que le visionnage d’une émission n’est pas un acte « passif », mais mobilise quantité de « microsavoirs » accumulés ;
– savoir que, quand il introduit les médias comme objet d’étude, c’est pour apprendre à l’élève à les analyser sous un triple point de vue : « pouvoir » économique et politique qui les produit, « mises en discours et en scène » qui construisent les messages et audience qui leur donne « du sens » ;
– accepter un nouveau rapport d’éducateur-adulte à l’élève, des élèves entre eux et de tous à la connaissance : l’élève peut apprendre au maître, les élèves peuvent apprendre entre eux (notamment en confrontant leurs points de vue ou leurs sources d’informations ou leurs solutions au problème posé, en dialogue direct, par courrier électronique ou forum interposés) ;
– accepter de faire entrer à l’école d’autres univers et d’autres modalités d’appropriation de la réalité : en particulier, il peut, à partir des émotions provoquées par la télévision, travailler sur les diverses « mises en scène du réel » et construire progressivement une pensée rigoureuse.
Changement de regard de l’enseignant, mais aussi, selon Geneviève Jacquinot, évolution dans les postures vis-à-vis du savoir scolaire et en ce qui concerne la gestion de la classe : cela dépossède l’enseignant de l’unique expertise qui se trouve ainsi davantage dispersée ; l’enseignant qui travaille sur les médias ne dispose pas d’un corps de connaissances transmissibles de celui qui sait vers celui qui ne sait pas, car l’information appartient à tous et les médias « mettent (presque) sur le même pied d’égalité élèves et professeurs » ; quand on travaille avec les médias, on centre davantage l’attention sur celui qui apprend, et pas seulement sur ce qu’il apprend ; enfin, ce qui est appris à l’école sort du cadre de celle-ci et se prolonge dans la vie de tous les jours.
CONCILIER MÉDIAS ET PROGRAMME DE SA DISCIPLINE
L’éducation aux médias est un domaine du socle commun. Elle est transversale à toutes les disciplines. Autrement dit, ce ne sont pas des objectifs en plus, mais ce sont des finalités que les objectifs des disciplines peuvent utilement servir. Cette éducation est une incitation à traiter un contenu et des savoirs en piochant dans l’infinie variété des médias, de façon à ne pas présenter un savoir scolaire complètement décontextualisé et sans prise sur les réalités contemporaines.
Certains événements dramatiques ont saturé nos écrans et l’esprit de nos élèves, par exemple le 11 septembre 2001, le Tsunami en Asie, en 2004, celui de 2011 au Japon, les révolutions arabes en 2011 et les attentats à Paris en janvier 2015, la crise Covid en 2020 : ils ont animé les débats sans pour autant avoir fait l’objet de supports d’apprentissage, sous la forme de décryptages et analyses. Les élèves étaient pourtant souvent demandeurs quand certains professeurs préféraient le traitement du programme, coûte que coûte. Il s’agit pourtant de dépasser les émotions et le sensationnalisme du traitement journalistique pour entrer dans une certaine complexité (cf. chapitre 30).
Dans ce cas, le réseau des internautes devient extrêmement réactif et créatif. En combinant par exemple un suivi attentif sur le réseau pédagogique avec les échanges sur Twitter, vous disposez rapidement de supports actuels (photos, cartes, vidéogrammes, infographies) et de premières propositions de séquences élaborées par d’autres collègues. Les élèves seront impressionnés par votre réactivité et le recul que vous leur proposez par rapport au caractère événementiel.
De la musique pour enrichir la discipline
L’originalité de la démarche crée un climat de travail tout à fait sympathique. Dans une classe connue pour son agitation permanente, j’avais obtenu une attention forte et un niveau sonore inhabituellement bas lorsque, pour travailler sur le monde médiéval, j’avais inscrit en fond sonore de la musique grégorienne. Les élèves l’ont redemandée pour le contrôle sur table. Résultats garantis.
L’évocation musicale à l’entrée des élèves pour chaque séquence contribue à ancrer des connaissances et des savoirs parfois difficiles à « faire passer » ; cette technique crée un contexte d’apprentissage favorable à la mémorisation (on appelle cela la mémoire de contexte, qui permet de rappeler des savoirs complexes), et les élèves « sont demandeurs ».
Deux utilisations de ces documents sonores s’il s’agit de créer une ambiance, choisissez des fonds musicaux1 ; si vous travaillez sur la musique et les paroles, préférez des chansons2.
Bonus Web ☛ Garden.radio, c'est un site qui vous permet d'écouter les radios du monde entier en parcourant une carte du monde en 3D comme sur Google Maps / Google Earth. Chaque point vert représente une statton de radio. http://radio.garden/
Valses viennoises en première pour aborder les évolutions démocratiques dans les régimes autoritaires, musique japonaise en terminale pour le chapitre sur le Japon en géographie…
Un blog pour enseigner l’histoire par la chanson : https://lhistgeobox.blogspot.com/ L’hist-geo Box offre une bibliothèque unique de chansons historiques. « La chanson est un matériau exceptionnel pour comprendre l’histoire. » Des dizaines de notices sur des chansons en lien avec l’histoire. Du Massilia Sound System pour illustrer l’Antiquité, aux chansons des années Thatcher. 21 titres sur la Seconde Guerre mondiale, 33 sur la guerre froide, 27 sur la décolonisation, 21 sur 1968. Aucune époque n’est oubliée. Alpha Blondy est par exemple convoqué, avec « Science sans conscience » pour évoquer la Renaissance. Réalisé par Julien Caillé, professeur au collège René-Caillié de Saintes, Étienne Augris, Véronique Servat, Jean-Christophe Diedrich et Emmanuel Grange.
AMÉLIORER LES USAGES DE L’IMAGE DANS SA CLASSE
Alain Lieury, directeur du laboratoire de psychologie expérimentale de Rennes 2, l’avait déjà noté : l’image n’est pas en soi plus performante que la parole du professeur ; elle ne peut être un substitut jugé plus efficace ou plus attractif.
Les usages de l’image en classe sont pourtant nombreux mais restent limités à des fonctions simples d’illustration sans activité propre pour l’élève : la photographie-prétexte pour rendre plus concrète une idée (une vue du Sahara pour exprimer une situation géographique de faible densité, par exemple) ; la photographie-symbole qui doit signifier une idée annonçant un développement (par exemple, le World Trade Center comme image de la puissance américaine défiée et vacillante) ; la photographie-décor qui défile sans attention requise, pour supporter le discours du professeur, comme au journal télévisé ; la photographie-synthèse reprenant les différents éléments identifiés dans le cours.
Comment utiliser les images
L’image est cependant plus riche et pourrait être un excellent support pour construire les savoirs. Gérard Hugonie1 suggère quelques pistes :
1. D’après Gérard Hugonie, conclusion du rapport sur l’utilisation de l’image (novembre 1995), édité par l’inspection pédagogique de l’académie de Paris.
- poser la problématique et formuler une hypothèse, par exemple en confrontant deux images contrastées d’une même réalité, d’une même période ;
- identifier, reconnaître les éléments constitutifs de l’image : prendre le temps de dessiner (sur un tableau blanc) et de nommer ensemble permet de construire une relative objectivité du regard, en dépassant l’impression et les regards toujours subjectifs et sélectifs sur l’image ;
- élaborer une définition après identification des éléments : en pas- sant du particulier au général, en proposant un type parmi une typologie, donner des repères facilement applicables dans une autre situa- tion spécifique ;
- élaborer un savoir-faire : apprendre à lire et à interpréter un paysage, un tableau ; distinguer les grands ensembles, la composition, les lignes de forces, repérer la notion de point de vue ;
- construire un croquis explicatif, synthétique, qui permet de transposer les éléments observés en les mettant en lien dynamique ;
- en faire un support d’évaluation. Cet usage couple celui de l’identification en demandant de décrire les éléments constitutifs choisis et celui de la recherche d’une définition déjà abordée.
PETITE TYPOLOGIE DES IMAGES DANS UNE CLASSE
Serait-ce dire que mettre en avant la difficulté ou l’absence d’équipement relève du faux débat ? Et de renvoyer aux hussards noirs de la IIIe République qui, face à des publics importants et pas toujours en phase avec la culture de l’école, enseignaient à coups de panneaux dessinés et d’images édifiantes largement commentées. Si tel est le cas, contactez très vite le coordonnateur de votre discipline, sinon le gestionnaire de l’établissement, ou le directeur de votre école, pour étudier avec lui un devis d’équipement (les crédits sont à engager avant la fin octobre). Après, c’est une affaire de quelques semaines.
A minima en termes d’équipement, on peut toujours s’appuyer sur la photographie, l’image du manuel, l’image filmique ou l’image satellite.
La photographie (ou l’image sélectionnée sur Internet)
Classique, même évidente, elle peut être prise comme racine d’une séquence. La démarche est plus approfondie, le support plus grand, la situation idéale étant la projection sur le tableau blanc, de façon à travailler directement sur la photographie : une réelle appropriation du document. L’élève se trouve plongé dans l’image elle-même pour mieux la décortiquer.
Pour la décrypter, il faut :
passer par une phase de définition : nature du document, sujet, auteur ;
s’attarder sur la phase de description du document : angle de vue, ana- lyse des différents plans ou de la structure (lignes de forces d’un tableau) ;
décoder les différents éléments constitutifs par la réalisation d’un croquis analytique simple identifiant les éléments majeurs ;
ouvrir le champ de l’explicitation par la mise en rapport des éléments entre eux et du contexte historique ou géographique, mais aussi scientifique et artistique.
L’image du manuel
Les manuels sont riches en images de toutes natures : photos, gravures, tableaux, graphiques, plans, cartes… Le manuel est la « chose » de l’élève, à la différence des autres images et supports plus externes. (Sur le manuel, outil d’enseignement et son choix stratégique, voir le chapitre 10 « Mettre en œuvre des outils ».)
Outre les différentes utilisations détaillées ci-dessus, on peut tout autant organiser la lecture du manuel comme un véritable stock de représentations visuelles et mentales dans la mesure où la méthodologie est suivie :
nature du document ;
titre du document et son producteur ;
décryptage des codes, produits et organisés en fonction d’un effet recherché. Ce moment est essentiel pour enraciner la représentation mentale chez l’élève : celle-ci passe par la compréhension et la dénomination de signes.
L’image filmique
L’image filmique, extraite d’une vidéo d’un film ou d’un documentaire, devient un support comme les autres. Désormais les salles sont générale- ment dotées d’un système vidéo (ordinateur,connecté, TV + lecteur DVD) soit fixe, soit sur chariot roulant, de sorte à l’utiliser dans la classe comme tout autre matériel (par exemple : vidéoprojecteur).
La méthodologie. Elle est a priori similaire à tout autre document étudié.
- Une nécessaire identification des sources filmiques : comme tout docu- ment, l’image est une production avec sa date, son auteur, son « générique ». Bien distinguer fiction de documentaire, reconstitution, reportage, etc. Pour nos élèves, jeunes ou moins jeunes, c’est toujours nécessaire.
- La détection des éléments d’accompagnement de l’image, qui nourrissent l’image et lui donnent un surplus de sens : texte incrusté, fond sonore, illustration ou citation musicale. C’est un condensé d’informations qui passent la plupart du temps dans la sphère de l’inconscient ou de la sensation, souvent référencé à d’autres. Le décodage s’impose.
- L’identification des éléments purement filmiques de production de l’image, qui renforcent le sens ou l’intention du message de l’extrait choisi : les mouvements de caméra (fixe ou mobile, travelling avant, arrière,
zoom), les différents plans (plan général, rapproché, plan américain, gros plan), les angles de prises de vue (plongée, contre-plongée), le découpage par plan-séquence (à chaque fois qu’il y a coupure et déplacement de position de la caméra). On introduit alors la notion de « point de vue ».
Attention : le meilleur des documentaires ne sera pas pour autant le meilleur des alliés pour votre cours. Ainsi, par exemple, l’excellent commentaire de Philippe Meyer dans De Nuremberg à Nuremberg est parfois en grand décalage avec des images sélectionnées de la Seconde Guerre mondiale : du très grave sur du très anodin, en apparence. En cela, c’est un « piège à élèves ».
Un support pour le cours. Il ne s’agit pas toujours d’organiser une séquence autour de l’image ; elle est un des supports possibles qui s’intègrent dans un déroulé de tâches variées. Quelques séries disponibles en DVD, ou à présent sur les plateformes (Lumni, ou Youtube) s’avèrent de fantastiques alliées. On peut penser aux cinq minutes intenses du Dessous des cartes de Jean-Christophe Victor1 comme un rendez- vous régulier hebdomadaire avec une classe, ou un début de cours où vous pouvez extraire une donnée plus précise. La série Palettes (durée : vingt minutes) d’Alain Jaubert, consacrée à l’étude d’un tableau est une occasion d’introduire l’art et son histoire dans le module « histoire des arts ». Ou encore l’image peut aussi être le prétexte d’un cours, à l’instar de l’étude de Paysages, à partir des fantastiques émissions de Jean-Loïc Portron (Arte)2.
Un support pour dessiner. Le recours au tableau blanc (par capture d’image et édition couleur), à l’infographie (logiciel de traitement d’image, PowerPoint par exemple), permet de triturer la matière et de mettre l’élève en activité dans une situation-problème complexe et, par nature, pluridisciplinaire. La créativité devient une occasion pour apprendre, à l’instar des cartes heuristiques (voir le chapitre 30).
L’image satellite
Avec la diffusion de Google Earth, l’image satellite est une image comme les autres, peut-être plus attractive par son aspect innovant et la qualité des couleurs, par sa vulgarisation aussi dans les manuels et à la télévision. Il suffit de savoir qu’il s’agit de compositions colorées établies à partir des données numériques enregistrées par les capteurs du satellite. Elles sont datées. La première lecture est souvent affective parce qu’on reconnaît l’espace présenté ou qu’on apprécie la composition colo- rée. Pour l’analyser, on adoptera une démarche en cinq étapes.
Cartes et commentaires sont accessibles sur le site d’Arte : www.arte.tv/fr (Dessous des cartes). Un recueil des pages et supports pédagogiques créés à partir des émissions de « Paysages » sur le site Diversifier, tapez « Paysages ».
Le repérage dans l’espace et dans le temps.
La lecture de l’image qui s’effectue sur quatre critères appelés descripteurs : les éléments linéaires, la couleur, la structure et la texture.
Le zonage qui est la recherche de plages à l’intérieur desquelles les descripteurs sont homogènes.
L’interprétation qui est la véritable exploitation géographique par la formulation de questions et d’hypothèses d’explication.
La cartographie synthétique ou thématique à partir de la grille de description et d’interprétation.
Cet autre « regard » sur le monde, en jouant notamment sur les changements d’échelle, entre local et global, participe à la formation intellectuelle des élèves en proposant de nouvelles attitudes, de nouvelles habilités et une fluidité appréciée dans les approches de la connaissance.
L’IMAGE DE SOI
Jusqu’à présent, nous avons envisagé l’audiovisuel sur des supports externes, permettant de travailler sur des éléments de savoirs. Mais il peut agir aussi comme un miroir quand le travail est centré sur les compétences propres de l’élève. Deux pratiques sont mises en œuvre : l’autoscopie et l’enregistrement vocal numérique.
L’autoscopie
Mes élèves ont un problème avec leur propre image ; impossible d’utiliser la vidéo en cours.
L’autoscopie est la confrontation de l’individu ou du groupe qui a été filmé avec sa propre image ; c’est une observation différée de soi-même ou du groupe. Les résistances normales à se confronter à sa propre image peuvent se réduire en inscrivant la pratique dans une perspective formative (et jamais évaluative) et en affichant explicitement les objectifs. Le contenu scolaire ou le thème choisi ici est le moins important. Car il s’agit de travailler sur les compétences liées à la communication et à l’estime de soi, domaines encore peu investis à l’école, mais essentiels dans la réussite scolaire de l’élève ; ils s’inscrivent pourtant dans de nombreux référentiels, dès le collège (cf. le socle commun).
Les domaines observés concernent le paraverbal (la voix, etc.) et le non- verbal (toute la gestuelle). On peut distinguer trois types de gestuelle : la gestuelle d’imitation (le geste mime l’action du discours) ; la gestuelle de ponctuation (on parle plus ou moins avec les mains, on bouge plus ou moins, etc.) ; la gestuelle dite « autique » qui indique un malaise ou un stress.
L’autoscopie se révèle un dispositif de travail puissant pour changer rapidement les attitudes, gestes, savoir-faire, et participe au développement de compétences. En mettant au centre de l’attention du groupe un véritable objet de travail où chacun a quelque chose à apprendre, il rend plus disponibles les personnes avec des enjeux forts en termes identitaires pour peu que la confiance soit créée : on s’autorise à changer collectivement1.
La mise en œuvre nécessite auparavant quelques précautions :
- Tous les participants sont volontaires.
-On explique soigneusement les objectifs et les modalités de la séquence.
- On prend le temps d’élaborer ensemble la grille d’analyse, autant que possible à partir d’une grille existante qu’on s’efforce d’améliorer. Il est extrêmement important que les élèves eux-mêmes la construisent et s’approprient les critères d’observation.
L’autoscopie peut avoir un objectif différent de celui de la communication. En EPS2, on filme une courte séance de jeu collectif, puis les élèves visionnent la vidéo (sur la tablette) en repérant le placement des équipiers, le passage de la balle, les éventuelles corrections techniques… Le dispositif est d’autant plus efficace si quelques élèves sont pourvus de tablettes numériques pour faire un décompte en direct et visualiser instantanément les graphiques induits.
Voir l’article sur les gestes, le paraverbal et la formation, http://urlz.fr/6Qi3 - Voir les vidéos sur le site CANOPE de Grenoble http://urlz.fr/6v06
Le même dispositif a été constaté en salle de restaurant d’un lycée hôte- lier : caméra sur pied fixe ; prise d’image durant tout le service ; puis une fois les clients partis, la vidéo est revue pour l’analyse critique et coopérative du groupe sur le placement, les gestes, la coordination de la « brigade » de service. En deux mois, tout est réglé comme du papier à musique.
S’ENTENDRE PARLER
Se voir, c’est difficile, s’entendre parler, cela devient impossible. Les performances en France en langues vivantes sont loin d’être extraordinaires et les échanges linguistiques montrent qu’après deux ans de pratique, un jeune Allemand est déjà bien avancé par rapport à son collègue français. Une enquête, il y a quelques années, avait estimé le temps moyen pendant lequel un bachelier avait effectivement parlé anglais au cours de ses sept années d’apprentissage. On arrivait à… vingt minutes. Confronté à ce déficit de compétences orales, le numérique offre de nombreuses facilités.
Le labo de langues, très apprécié des élèves. Les élèves apprécient les activités en laboratoire de langues et savent qu’il n’y a pas meilleur moyen d’évaluer correctement et d’améliorer leur prononciation qu’en écoutant leur voix enregistrée. Dans la cabine, les timides sont rassurés : pas de moqueries de la part des camarades. On dialogue avec le professeur comme « en privé ». Certains parlent ainsi plus en une heure qu’ils ne le feraient pendant une année en classe entière. Les plus lents ont tout leur temps, quant aux plus rapides, il sera facile de leur proposer une autre série d’exercices. Enfin, chaque élève est actif : à chaque question posée, dix-huit élèves peuvent répondre et être contrôlés alors qu’en classe une réponse ne peut être formulée que par un seul élève, ou au mieux par un groupe restreint.
L’évolution des équipements en CDI par exemple, en « learning center », transforme désormais n’importe quel poste en possibilité d’enregistrement audio au format MP3, d’écoute et de vidéo (voir https://vocaroo.com/ ). Une majorité d’élèves dispose dans le secondaire d’un lecteur MP3, sinon de leur propre portable– dans les collèges, cela est mis à disposition –, leur permettant d’embarquer dans la poche des fichiers audio téléchargés sur la page de leur professeur préféré à partir de l’ENT du lycée. Même en mathématiques, la narration et la résolution de problèmes en groupe se reportent en MP3 de sorte que l’enseignant capitalise les stratégies, les tentatives et les réussites en différé1.
On retrouve ici quelques caractéristiques propres à tous les outils de l’enseignant : plus nombreux, plus petits, plus fluides, plus numériques et plus nomades, ils deviennent les outils des élèves. Cette tendance que nous allons retrouver plus loin est celle d’un système qui passe d’une logique d’enseignement à une logique de formation.
AUTOTEST : LES CINQ DERNIÈRES FOIS…
Les cinq dernières fois que j’ai utilisé l’audiovisuel (sous ses formes les plus variées) avec les élèves, c’était :
Support audiovisuel |
Thème abordé | Intégration dans la séance (partie ou tout) | Rapide bilan : point fort/ point à améliorer |
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1. Comme au collège de Scey-sur-Saône, vidéo sur http://urlz.fr/6v08
La musique du jour
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