l'équipe reste une organisation qui s'apprend et qui apprend aussi

Les Ménines- vue d’ensemble (d’après Velázquez) Cannes, 3-Octobre 1957 huile sur toile 129 x 161 cm Museu Picasso, Barcelone., voir la page https://lewebpedagogique.com/khagnehida/archives/28772

(suite des posts sur le travail en équipe)

Ces approches plus créatives et plus collégiales du travail franchissent la « frontière invisible » dans l’établissement ; il s’agissait bien souvent de (ne pas) toucher à l’organisation du travail, en favorisant (ou non) l’élaboration collective, la mise en débat du métier, l’analyse partagée de données et de résultats. Ces « petits pas », progressifs, sont les conditions d’une organisation qui apprend1 d’elle-même, sur elle-même, pour améliorer son propre fonctionnement.

Cette dimension « moderne », déjà éprouvée dans d’autres organisations depuis plusieurs (dizaines) d’années, concerne à présent le travail enseignant. Le « travail d’équipe » ou « en équipe », maintes fois invoqué et parfois réalisé, ne peut se produire sans un minimum d’organisation et une part certaine d’ingénierie.

Voir les travaux d'Alain Bouvier sur l'établissement, fabrique de compétences sur la page ici

LES PROFS APPRENNENT DES PROFS

Les techniques viennent soutenir un processus dynamique repéré comme « développement professionnel continu ». Une étude américaine montre que les enseignants les plus performants ont un effet positif sur leurs collègues. « Les enseignants apprennent de leurs pairs et les effets ne sont pas petits. » C. Kirabo Jackson et Elias Bruegmann, professeurs à l’université d’Ithaca1 (New York) ont étudié la valeur ajoutée des enseignants en se basant sur les résultats des élèves. L’arrivée d’un professeur compétent entraîne une amélioration des résultats des enseignants de son équipe éducative. Les enseignants expérimentés transmettent des savoir-faire à leurs collègues. Sans formation stricto sensu, la collaboration professionnelle et la régulation d’une équipe sont des ressources tout aussi efficaces dans le développement professionnel, et a fortiori pour les nouveaux entrants dans le métier.

visuels extraits de https://cursus.edu/fr/11416/lorganisation-apprenante-dix-principes-et-plus-encore avec F. Duriez toujours excellent

Se donner quelques référents communs : une technique pour stabiliser un concept en équipe

Souvent, des équipes très engagées évoquent les « valeurs », sans pour autant les expliciter. Les valeurs ne sont pas une donnée en soi, malgré l’inscription de la trilogie républicaine au fronton de nos écoles, elles se construisent en équipe, comme au collège du Chaudron à la Réunion2. À cet égard, la technique du Q-sort (choix à partir d’une série de propositions,) peut être appliquée, par exemple sur le concept et/ou les pratiques de l’interdisciplinarité. Ce début de consensus permet à tous les membres d’approfondir, par exemple dans une étape ultérieure, les modes et les techniques d’évaluation du travail des élèves.

Ce protocole est actif dans nos écoles et collèges actuellement quand tous, nouveaux comme plus anciens, se confrontent à de nouveaux « objets » de travail.

Le Socle commun de connaissances et de compétences reste encore un champ à défricher, bataille pour les uns, exploration pour les autres. Tous ont à apprendre sur le concept lui-même comme sur ses modalités de mise en œuvre. De fait, il s’agit moins de « mise en place » pour les structures, pour les personnels, pour les pratiques que d’une étude de fond portant sur les représentations en la matière fort diverses, sur les résistances à ce type d’approche, et sur les évolutions en termes d’identité professionnelle. C’est pourquoi à l’occasion de l’encadrement d’un grand groupe (120 personnes), nous avons proposé la technique dite du Q-sort (1..

✐ Consigne : quelles sont les deux propositions auxquelles vous adhérez ; les deux propositions que vous rejetez. Discutez-en avec vos collègues.

❏ 1. C’est l’actualisation du système français au cadre européen de l’éducation.

❏ 2. C’est encore une réforme de plus, jusqu’à la prochaine.

❏ 3. C’est enfin l’occasion de faire une école pour tous et pour chacun.

❏ 4. C’est la négation des disciplines et des programmes.

❏ 5. La logique du socle est en parfaite contradiction avec la culture et les pratiques de l’enseignement public français.

❏ 6. C’est une occasion unique de travailler ensemble et autrement.

❏ 7. C’est un casse-tête pédagogique pour les chefs d’établissement.

❏ 8. C’est un texte de cadrage qui permet des applications locales.

❏ 9. C’est la fin de la liberté pédagogique pour les enseignants.

❏ 10. Il est urgent d’attendre les instructions complémentaires.

❏ 11. C’est un document qui va donner de la cohérence aux enseignements et du sens aux apprentissages.

❏ 12. C’est un compromis infaisable entre la pression de lobbies et des directives européennes.

❏ 13. La logique du socle est en pleine harmonie avec notre projet d’école/d’établissement.

❏ 14. C’est un moyen pour en perdre (des moyens).

❏ 15. Nous attendrons une formation pour nous y mettre.

❏ 16. C’est un dispositif qui permet de remettre les évaluations à leur juste place.

❏ 17. C’est introduire le libéralisme dans l’univers scolaire.

❏ 18. C’est un chantier de vingt ans.

❏ 19. C’est l’aboutissement d’une réflexion vieille de quarante ans.

❏ 20. C’est « ce qu’il n’est pas permis d’ignorer » au terme de l’école obligatoire.

❏ 21. C’est la modernisation du cadre professionnel qui permet l’évolution des pratiques.

❏ 22. C’est posséder pour les élèves un outil indispensable pour sa vie, pour la société.

❏ 23. C’est impossible sans l’accompagnement des enseignants.

❏ 24. C’est un document qui demande à être discuté par les équipes.

Q-sort – Consignes de passation

La passation doit se réaliser, individuellement ou collectivement, dans le strict respect de l’anonymat. Les réponses personnelles de classement de propositions ou items doivent être marquées sur deux morceaux de feuille sans nom, dont l’un est gardé par son rédacteur. Ces feuilles peuvent être fournies imprimées à l’avance selon les modèles donnés ci-dessous ou fabriqués sur un modèle tracé au tableau.

Les consignes peuvent s’appliquer à la personne même qui passe le Q-sort mais on peut aussi demander à celle-ci de se placer du point de vue d’autres personnes (à définir) ou du point de vue du sens commun.

Les consignes peuvent être relatives à l’idéal qu’on se fait du concept ou relatives à la façon dont on l’envisage dans la pratique.

Les consignes peuvent également porter sur le passé et le présent. Le classement s’effectue selon des échelles de répartition correspondant à une distribution aussi proche que possible de la distribution gaussienne. Ces échelles sont placées sur les modèles de feuilles-cadres. Une telle répartition obligée contraint d’une certaine façon l’individu à décider ses choix de façon aussi réfléchie qu’affective. Il faut compter de quinze à trente minutes pour un Q-sort de vingt items.