suite des posts dédiés au travail en équipe
« CONCERTATION » : LA RÉGULATION NÉCESSAIRE ET JAMAIS SUFFISANTE DE L’ÉQUIPE
Si vos réunions se révèlent décevantes, c’est aussi souvent parce qu’on les dévalue, soit en les organisant trop fréquemment (c’est la fameuse « réunionnite » si exaspérante), soit en attendant si peu de ces échanges qu’à force de ne pas y croire, on finit par créer ce qu’on craint : des réunions où rien ne se dit ou ne s’élabore. Chaque réunion peut pourtant surprendre par sa richesse et ses rebondissements… pour peu que de réelles possibilités de communication soient accordées aux participants. Question d’organisation ! Il n’existe pas en réalité de mauvaises réunions, mais plutôt des réunions insuffisamment préparées. Au-delà d’une efficace organisation matérielle, une bonne préparation suppose aussi, de la part des responsables, d’y poser des enjeux, d’être ouverts à tout ce qui pour- rait se passer, d’accueillir l’imprévu comme les opportunités.
On a de gros problèmes de méthodologie et de surcharge de travail. C’est un peu la « réunionnite ».
Comment éviter la réunionnite aiguë
Quelques règles simples permettent de prévenir le syndrome de la réunionnite aiguë.
Déterminez un calendrier prévisionnel de réunions d’équipe, ni trop, ni trop peu, de façon à permettre à chacun de s’organiser en termes de disponibilité matérielle (et mentale).
Quelques jours avant une réunion, consultez les participants et fixez un ordre du jour en quelques points d’interrogation, centrés sur le projet mené ou le problème rencontré, afin d’éviter tout débordement qui ferait dévier l’objet même de la réunion ou toute surcharge.
Autorisez-vous un protocole des rôles tournants si possibles, à tenir : animateur, secrétaire de séance, gardien de l’ordre du jour, ambassadeur de l’équipe, etc.
Chaque fin de réunion doit se clore par la récapitulation des points de décisions prises, des questions encore à traiter, de la date de la prochaine réunion.
Organisez le travail entre deux réunions en constituant des mini- groupes, ou des binômes chargés de collecter de l’information, de produire un document qui sera soumis au groupe.
Tenez ou faites tenir un cahier de bord de l’équipe, collectant à la fois les relevés de décision, les documents de travail, les documents ressources utilisés. Cela permettra de dépasser l’impression pénible de la stagnation et d’informer les éventuels absents ponctuels. Vous contribuez ainsi à augmenter le « capital » professionnel de votre équipe1.
L’équipe s’élargit aux partenaires de l’École
Le capital de l’école s’enrichit aussi de l’ouverture à des partenariats en réseau ; l’équipe n’est plus (seulement) enseignante, elle devient partenariale ; sans être une nouveauté absolue (c’est rare), c’est devenu un fait avéré pour au moins la moitié des actions étudiées2. Cette ouverture de l’équipe aux ressources de la « communauté » – associations, parents, collectivités – a des effets sur la qualité du travail engagé : le suivi plus attentif, la communication mieux construite ou plus attrayante souvent, une amplitude des actions et aussi un dispositif d’évaluation plus recherché.
L’inscription institutionnelle d’un partenariat ne suffit pas à en assurer son efficacité (type 1) ; l’attention des équipes sera plutôt portée sur les conditions et les modalités plus concrètes (type 2 et 3), voire évoluer vers un « partnership » à parité et en association durable (type 4).
D’après La recherche et l’innovation dans l’enseignement, OCDE, 2014. Plus de la moitié des 300 actions dites « innovantes », analysées dans le recueil construisent leur dispositif sur des relations et des contributions partenariales, François Muller, L’innovation, une histoire contemporaine du changement en éducation, CNDP, 2012.
Une rapide modélisation peut aider à situer sa propre collaboration et, au besoin, à la faire évoluer au bénéfice de son projet et de ses élèves :
Vers une organisation « apprenante »
Les équipes passent insensiblement les étapes d’une organisation encore culturellement marquée par le projet à une organisation fondée sur l’efficience par la régulation. Moins linéaire et plus dynamique, elle enrôle les acteurs et multiplie les interactions, elle est une organisation apprenante et source de développement professionnel1.
Elles investissent quelques domaines identifiés tels que :
l’autoévaluation de son action, compétence régulatrice de l’équipe dans son projet ;
l’apparition des dispositifs de « développement professionnel », analyse, coobservation, coformation, accompagnement par un « ami critique » ;
la mise en réseau d’unités éducatives et la coopération renouvelée entre équipes, enseignantes et de direction ;
le développement de partenariat qui accentue la valeur éducative des actions pour les jeunes ;
un nouveau partage des rôles et des responsabilités (prise de rôle, fonctionnel, tournant, etc.).
Un groupe expérimental de formateurs, aidé des travaux d’Alain Bouvier(2), a pu en produire une carte heuristique), que nous proposons à l’attention des équipes de direction pour examiner à leur tour leur style de management.
« Une organisation intelligente ou apprenante est un système d’action, de conduite de l’action et d’apprentissages collectifs, qui s’organise pour apprendre en permanence, capitaliser ses savoir-faire et ses compétences, pour les transmettre et se transformer volontairement pour atteindre ses objectifs en fonction des évolutions de son environnement, de ses ressources, de sa culture… Pour cela, elle s’appuie sur la remise en question de ses processus et sur une adaptation permanente à son environnement. Elle s’inscrit dans le paradigme systémique et la pensée complexe. Elle assure une veille. Elle se préoccupe de l’accompagnement des acteurs et cherche à maintenir un climat propice au développement de leur curiosité, de l’innovation, de l’expérimentation, de la pratique du risque calculé. » Alain Bouvier, L’établissement scolaire apprenant, Paris, Hachette, 2001.
Ces différents points sont développés à la lumière des apports de la recherche internationale, dans , École, la grande transformation ? Les clés de la réussite, ESF, 2013.
L’organisation en équipe est toujours une « aventure »
Dynamique, non-linéarité, enrôlement, système sont donc les principes d’une transformation silencieuse et réelle du travail collectif enseignant. À cet égard, la recherche internationale1 nous renseigne sur la manière dont une institution, petite à l’échelle d’un établissement, moyenne (académie) ou grande (nationale), peut s’accommoder avec profit de cette nouvelle conduite du changement : nous reprenons ici les conclusions de Michael Fullan(3). Elles nous semblent utiles en ce qu’elles illustrent les quelques principes tirés de l’expérience des actions suivies actuellement :
On ne peut jamais préconiser à l’avance le changement (plus la réalité est complexe, moins on a de prise sur elle).
Le changement est un voyage et non une planification (il est rem- pli d’incertitudes et il peut même avoir des effets pervers, c’est-à-dire contraires à ceux recherchés).
Les problèmes et les difficultés sont nos amis (ils sont inévitables et il n’est pas possible d’apprendre sans eux).
La vision d’ensemble du changement et la planification stratégique viennent après coup (une vision et une planification prématurée rendent aveugles aux réalités).
L’individuel et le collectif doivent s’équilibrer (éviter l’isolement des individus mais aussi trop de réflexion collective).
Les solutions imposées d’en haut, par la hiérarchie, ou les solutions adoptée d’en bas, par l’établissement, ne marchent pas à elles seules (il faut concilier les deux approches dans le dialogue et la concertation).
Les liens de l’établissement avec son environnement local sont essentiels pour son succès (on apprend mieux de ses partenaires qu’en se focalisant sur ses problèmes internes).
Chaque individu peut être un acteur du changement (il y a un expert en chacun de nous, une connaissance ou une compétence à partager).
Ce sont des traits caractéristiques de la quatrième voie définie ainsi par Andy Hargreaves et Dennis Shirley, du Lynd School of Education, Boston College, dans leur ouvrage de 2011, La face cachée de la réforme.
(3) Change Forces. The Sequel, London, Taylor & Francis Group (1999). www.michaelfullan.ca/
AUTOTEST : PARTICIPEZ ACTIVEMENT À LA RÉGULATION D’UNE RÉUNION
✪ Lors des toutes prochaines réunions prévues d’une équipe de classe ou d’école, vérifiez si les points méthodologiques suivants sont appliqués :
❏ réunion annoncée à l’avance ;
❏ points de l’ordre du jour prévus ;
❏ ordre du jour respecté ;
❏ distribution des rôles ;
❏ alternance échanges oraux, mise par écrit ;
❏ relevé de décisions ;
❏ constitution en groupes de travail ;
❏ communication prévue à l’externe ;
❏ tenue d’un cahier de bord d’équipe ;
❏ programmation à l’avance de la réunion suivante.
✪ Proposez une amélioration sur au moins deux points qui vous semblent importants.
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