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Créer des situations d’apprentissage


"Faire cours" pourrait s’apparenter à une conduite de cours en pilotage automatique et sans grand retour réflexif sur sa propre pratique.

La centration sur des contenus, ou l’inattention à la gestion de groupe peu différencié, fait perdre un peu de vue à l’enseignant ce qui fait l’originalité d’une situation d’apprentissage : comment les élèves apprennent. Quels sont les points que l’enseignant peut vérifier pour engager les élèves à apprendre (plus, mieux, autrement) ? Quelles sont les conséquences pour lui, et également pour les élèves ? En définitive, est-ce que « faire cours », c’est faire apprendre ? Le terme même de « situation d’apprentissage » contient en germe toutes ces questions.

 

LA QUESTION DE FOND : QU’EST-CE QU’APPRENDRE ?

 Différentes études convergentes dans plusieurs champs disciplinaires depuis une vingtaine d’années ont insisté sur l’activité de l’élève en tant que facteur primordial de son apprentissage : il ne s’agit pas de sombrer dans un activisme à tous crins, on parle plutôt d’activité intellectuelle par opposition à des situations de « paresse intellectuelle » aisément observables en classe : recopier le tableau, noter sous la dictée du maître, combler des exercices à trous, est-ce que cela engage à une activité intellectuelle qui permette d’apprendre ?

“Pourvu qu’ils apprennent1 ! - Titre d’un recueil de mémoires de jeunes enseignants, par A. Davisse et J.-Y. Rochex (dir.), « Pourvu qu’ils apprennent… » Face à la diversité des élèves, Le Perreux-sur-Marne, CRDP, Académie de Créteil, 1998.

 

Dix propositions pour réfléchir sur l’apprentissage

 Jean Archambault 1 nous rappelle opportunément dix propositions sur l’acte d’apprendre, utiles pour renforcer votre argumentation dans un débat toujours vivace  sur l’école du socle.

  • Apprendre, le plus vieux métier du monde. Apprendre est un acte profondément humain, voire anthropologique. Il n’y a pour cela ni lieu ni circonstance spécifique dédiée.

  • Apprendre est naturel. À la différence de l’instinct animal, l’homme a développé l’apprentissage car il naît démuni. À sa capacité d’adaptation répond la variété des êtres et des comportements selon les contextes.

  • Apprendre fait partie de la vie et l’école n’en a pas le monopole. L’école n’est donc qu’un lieu d’apprentissage institué et collectif, parmi bien d’autres plus informels et tout aussi puissants, la famille, les pairs, la société.

  • Le processus d’apprentissage est le même chez tous les êtres humains. Il est similaire, par mobilisation des connaissances, par transposition, par analogie, par créativité, par réflexivité.

  • Apprendre et changer, c’est la même chose. Se former, c’est se transformer, changer ses propres représentations, s’enrichir d’autres expériences.

  • Les contenus, et les façons dont on les enseigne, changent. Les connaissances dans tous les champs disciplinaires, les conditions sociétales, les réseaux ont profondément évolué ; ces évolutions à bas bruit percutent une structure institutionnelle scolaire de plein fouet. Comment l’école peut intégrer la combinatoire, la complexité, le risque et les chances d’un monde incertain ?

  • Les élèves de milieux défavorisés apprennent de la même façon que les autres, alors que l’École en France accentue les différences 2.

  • Le changement relève d’une question de politique éducative au niveau décisionnel, tout autant que des pratiques enseignantes et des organisations locales des écoles et des établissements.

  J. Archambault et C. Richer. Une École pour apprendre, Montréal, Éd. de la Chenelière, 2007, voir aussi http://urlz.fr/6QI3- Voir le rapport Grande pauvreté et réussite scolaire, IGEN au CESE, mai 2015,   https://www.education.gouv.fr/grande-pauvrete-et-reussite-scolaire-le-choix-de-la-solidarite-pour-la-reussite-de-tous-8339

Dans une école, l’apprentissage doit passer en premier. La plus grande réussite des élèves tient à la focalisation des équipes d’école sur l’apprentissage, en écartant tout ce qui peut l’en détourner. Les modalités sont variées, du projet à l’enseignement explicite, elles ciblent toutes la com- préhension plus que l’accumulation.

 

L’apprentissage et la justice sociale, des visées qui se complètent. Être capable d’exprimer des attentes positives, élevées, devenir le soutien de tous ses élèves, afficher une solidarité collective sont des éléments décisifs dans la plus grande réussite des élèves. La justice sociale est un ferment de l’école, où les enseignants en sont les acteurs premiers.

 

Le rôle de l’enseignant est primordial. C’est un message rassurant, confirmé par la note du CAS1. Sans méconnaître le lien étroit entre milieu socio-économique et réussite scolaire, la qualité de l’enseignement est fortement liée à la réussite des élèves. Apprendre devient aussi un enjeu pour les enseignants dans leur propre développement professionnel (voir le chapitre précédent et le chapitre 29).

 

Finalement, apprendre c’est…

Philippe Perrenoud propose une définition rapide en trois conditions :

  • - Apprendre met en œuvre une activité dans laquelle l’élève s’implique personnellement et durablement.

  • - C’est une situation qui ne menace pas l’identité, la sécurité, la solidarité des élèves (voir le chapitre 15 « Assurer la sécurité »).

  • - L’activité présente un certain niveau de difficulté, mais toutefois accessible à l’élève.

 

On est passé progressivement, presque silencieusement, avec tous les décalages constatés sur le terrain, d’une logique d’enseignement (le« cours ») à une logique d’entraînement à la construction de compétences. Ce glissement sémantique prend appui aussi sur le type de formation proposée dans les programmes actuels, articulée autour du concept de compétence. « Il s’agit d’apprendre, en le faisant, à faire ce qu’on ne sait pas faire » (P. Meirieu, 1996). Le socle des compétences institutionnalise cette évolution. (Sur le concept de compétence, voir le chapitre 19.)

 

1. Pierre-Yves Cusset, Que disent les recherches sur l’« effet enseignant » (Note d’analyse 232, Juillet 2011), http://urlz.fr/6QI7


L’école entre dans une ère entamée depuis quelque temps déjà dans d’autres secteurs ou encore d’autres pays, celle de l’apprenance. Un néologisme que Philippe Carré, de l’université Paris 10, com- mente ainsi : « Un ensemble durable de dispositions favorables à l’acte d’apprendre dans toutes les situations : formelles ou informelles, de façon expérientielle ou didactique, autodirigée ou non, intentionnelle ou fortuite. »

 

CONCEVOIR UNE « SITUATION D’APPRENTISSAGE» ?

Nos amis québécois déclinent le thème en douze points, sous forme d’une « liste de vérification » d’une situation d’apprentissage1 :


  • La situation tient compte des intérêts des élèves.

  • La situation tient compte des connaissances antérieures des élèves.

  • Les élèves doivent résoudre des problèmes réels ou simulés susceptibles d’être rencontrés à l’école ou dans la vie à l’extérieur de l’école.

  • L’élève doit faire une ou plusieurs tâches qui permettront d’observer sa démarche et lui demanderont de réaliser une ou des productions.

  • La ou les tâches sollicitent plusieurs compétences.

  • Pour réaliser la ou les tâches, l’élève mobilise plusieurs ressources : notions, stratégies, attitudes, etc.

  • Les élèves font appel à leur créativité et produisent des réponses originales.

  • La situation incite les élèves à travailler en équipe ou à collaborer entre eux.

  • Les élèves ont accès à diverses ressources : livres, personnes, logiciels, etc.

  • Les productions sont destinées à un public (élèves de la classe, élèves des autres classes, parents, etc.).

  • Les élèves ont le temps nécessaire pour réaliser leur tâche. La durée est variable : quelques périodes, jours, semaines, mois, etc.

  • L’enseignant utilise plusieurs critères pour juger de l’efficacité de la démarche et de la qualité de la production. Les critères d’évaluation sont connus des élèves.

 

PARTIR D’UN PROBLÈME DONT LA SOLUTION  N’EST PAS IMMÉDIATE

Le point d’ancrage d’une situation d’apprentissage est donc une interpellation, une question sans réponse immédiate, un obstacle à négocier. Mais peut-on, par exemple, problématiser les lettres ? C’est la question que se pose Yvon Logeat en prenant appui sur une prétendue spécificité de la discipline qui l’exclurait de la réflexion générale1. «

1. Y. Logeat montre comment se pose le problème dans l’enseignement des lettres. http://urlz.fr/6RQF


Mathématiciens,physiciens voire biologistes peuvent prétendre enseigner la résolution de problèmes. Dans l’enseignement secondaire, les problèmes posés dans ces disciplines ramènent l’élève à ce qui lui a été enseigné et à des données connues et reconnues dans la discipline. Mais un professeur de littérature devra souvent se contenter d’apprendre aux élèves à se poser de bonnes questions. On dit d’ailleurs qu’il faut savoir “problématiser” à partir de l’énoncé d’un sujet de dissertation, par exemple, comme si “problématiser” relevait d’une démarche évidente pour nos élèves » qui vivent souvent l’école comme un lieu de réponses à des questions qu’ils ne se posent pas.

Quel rapport entre situation d’apprentissage et situation-problème ?

Susciter les questionnements

Problématiser est une première étape où l’on fait l’hypothèse que le savoir sera potentiellement une réponse à une ou des questions. Cependant, prenez garde à la dérive où à trop se focaliser sur la résolution certaine d’un problème, on néglige quelque peu son questionnement.

 

Formulez la situation-problème de façon à prendre le contre-pied de ces représentations majoritaires et à susciter les questionnements et la recherche collective d’éléments de réponse. Vous pouvez partir, par exemple, de :

  • une formule qui gêne ;

  • une idée ou un texte qui implique, qui interpelle ;

  • un résultat d’expérience qui ne semble pas logique ;

  • un problème qui paraît impossible à réaliser ;

  • un modèle explicatif en contradiction avec celui des élèves ;

  • deux éléments contradictoires (en apparence !) ;

  • deux éléments que l’on ne met pas en parallèle habituellement ;

  • un « piège » dans lequel les élèves tombent.

 

SITUATIONS D’APPRENTISSAGE ET REPRÉSENTATIONS DE LA CLASSE

Organiser des situations d’apprentissage conduit immanquablement à repenser la place de l’élève et celle du maître, dans ses propres représentations comme dans ses pratiques du quotidien.

 Comment je me représente ma classe ?

 

Parmi les schémas proposés à quel « modèle » correspond plutôt votre conception de la pratique de classe ? Le « bon » modèle n’existe pas en soi. Cependant, le pilotage de la situation d’apprentis- sage n’est plus le même, suivant que vous êtes (alternativement ?) en modèle « chinois », orienté vers la seule transmission, l’activité « professorale » de l’enseignement, ou que vous adoptez le modèle « fédéraliste ». La différence tient à la place accordée à l’élève dans votre « système » d’enseignement.

 

Les implications pour l’enseignant et les élèves

 Dès lors que vous passez en mode « situation d’apprentissage », dans laquelle les élèves sont beaucoup plus sollicités, les implications touchent aussi bien l’enseignant que les élèves.

 

Pour l’enseignant :

C’est d’abord accepter de suspendre au moins temporairement toute évaluation-notation ; on n’apprend qu’en sécurité et non sous surveillance.

C’est adopter une posture d’accompagnement (à côté ou derrière l’élève) plus que de rester sur l’estrade : l’acteur (au sens de celui qui agit), c’est l’élève, pas le prof.

C’est pousser à la collaboration entre les élèves ; comme au billard, les meilleurs résultats s’obtiennent par la « bande » ; les élèves sont très sensibles aux performances de leurs pairs, plus qu’à celles de leur prof, plus inaccessibles (c’est « l’apprentissage vicariant » défini par Bandura1).

C’est favoriser toutes les fois que cela est possible un retour sur l’activité, sous forme de rapide bilan ou de fiches autoévaluatives.

 

On est finalement proche d’une démarche de projet, telle qu’elle est décrite dans le chapitre 21 « Diriger des projets », ou des pratiques mises en œuvre dans les « structures expérimentales » actuellement.

 

Pour les élèves :

La sollicitation se fait plus proche ; l’enseignant est plus présent, ses camarades attendent la part du travail, il devient difficile d’échapper à la tâche ; interactions et feed-backs se multiplient.

Les formes d’évaluation proposées exigent des efforts d’explicitation, de mise en mots et une certaine lucidité qui favorise l’apprentissage.

On peut observer une forme de régulation collective, car le groupe a moins de risque de dévier ou de détourner l’activité partagée.

 Bonus Web ☛ À inscrire parmi ses favoris : le site de Jacques Nimier (disparu en 2014), « Les Facteurs humains dans l’enseignement » reste une mine de ressources, d’analyse et de témoignages, notamment sur les représentations, les attentes exprimées par les enseignants et par les élèves : http://www.pedagopsy.eu/

 

 


ULYSSE ENSEIGNANT

Mettre en avant la situation d’apprentissage comme modalité générique pour mieux apprendre transforme le métier de manière profonde ; l’enseignant devient un peu Ulysse : un homme qui, dans son parcours parfois chaotique, et confronté à de multiples obstacles, sait  faire preuve de « métis », cette ruse toute pragmatique et efficace pour  s’en sortir, lui et les siens. Il fait preuve d’une créativité en exploitant le  potentiel de situation, plus qu’en ayant tout programmé dans une illusoire stratégie constamment contredite par des  faits terriblement résistants.

 

C’est le point de vue défendu par Yves Guégan1 : « En classe, la ruse est un outil particulièrement approprié pour gêner les résistances. »

 

Le jeu comme ruse pour apprendre

 Ainsi, le jeu fait un retour en force dans l’univers scolaire en tant que situation d’apprentissage 2 : longtemps banni de l’École où le travail, dans une conception rigoriste et doloriste, dominait, ou encore contingenté dans le temps périscolaire, le jeu, qu’il soit d’esprit (les échecs) ou sérieux (sur l’Internet) est reconnu non seulement pour sa valeur éducative et socialisante (nos élèves découvrent souvent des « jeux de société » qui n’avaient plus cours dans l’espace familial), mais aussi pour ses qualités d’apprentissage et même de développement personnel.

 

La connaissance des processus cognitifs plaide pour l’utilisation de jeux en classe, reposant ou non sur un support informatique… Les « petits chevaux » à l’école primaire permettent de confronter, de temporiser, d’appliquer une stratégie et de dénombrer, tout autant que des exercices plus explicites mais escomptant moins sur la motivation intrinsèque des élèves. L’arrivée des « serious games » à destination d’élèves plus âgés permet d’installer des situations de simulation quasiment en temps réel, à la manière des Sim’s, pour gérer la complexité d’une cité et entrevoir ce que le développement durable et social peut recouvrir comme réalités diverses. La prise de décision est éclairée par des choix responsables et discutés.

 

 Yves Guégan, Les Ruses éducatives, 100 stratégies pour mobiliser les élèves, ESF, 2008 - Patrice Huerre, Place au jeu ! Jouer pour apprendre à vivre, collection « L’enfance en questions ».


Des scientifiques, signalent que la recherche s’appuie désormais sur les milliers d’internautes, en quête d’intelligence collective dans la résolution d’équations insolubles dans un laboratoire d’experts unique. De telles opportunités décalent certainement le statut et le rôle de l’enseignant : de « celui qui sait », il devient insensiblement celui qui permet de savoir coopérativement et «créativement », en émulation et non plus en compétition. Car dans la plupart de ces jeux de nouvelle génération, il ne s’agit plus forcément de gagner contre, mais de résoudre ensemble.

 

AUTOTEST : RETROUVEZ LES FACTEURS DE RÉUSSITE

Vous venez d’achever une séquence dont vous êtes particulièrement fier. Pour identifier ce qui était en jeu, et envisager de reproduire par transposition même partielle « ce qui a marché », voici en une série de questions l’analyse d’une activité d’apprentissage, proposée par Discas

1. J. Henry et J. Cormier, sur le site Internet de Discas ,  www.csrdn.qc.ca/discas/tdm.html

 

Mise en situation

❏ Y a-t-il un déclencheur d’intérêt ? humour, défi, curiosité, aspect ludique, autre.

❏ L’utilité de l’objectif a-t-elle été démontrée ?

❏ S’il y a lieu, les préalables (connaissances antérieures nécessaires à l’accomplissement de l’activité) ont-ils été rappelés ?

 

Expérimentation

❏ Toute l’information nécessaire est-elle présente (directives, matériel à consulter, etc.) ?

❏ A-t-on fourni à l’élève une représentation claire du produit final attendu ?

❏ Y a-t-il une place pour la découverte de l’information ?

❏ L’activité fait-elle appel à d’autres sources que l’enseignant et le manuel (observation, ouvrages de référence, matériel didactique, autres élèves, source extérieure à la classe) ?

❏ Y a-t-il de la place pour l’essai et l’erreur ?


Objectivation

❏ Y a-t-il une mise en commun des résultats (oralement, au tableau, autre modalité) ?

❏ Y a-t-il discussion des résultats (collectivement, en équipes, autre modalité) ?

❏ Y a-t-il un résumé de l’information essentielle (oral, au tableau, écrit

– notes, schéma, autre) ?

❏ Y a-t-il une généralisation des résultats (exemples, contre-exemples, énoncé de principe, autre) ?

❏ L’élève est-il invité à décrire sa démarche et à nommer les processus impliqués ?

 

Réinvestissement

❏ L’activité de réinvestissement fait-elle appel aux mêmes processus que l’activité initiale ?

❏ L’activité de réinvestissement diffère-t-elle de la précédente quant au sujet et au contexte ?

❏ L’activité de réinvestissement diffère-t-elle de la précédente quant au type d’interaction (individuellement, en équipe, collectivement, etc.) ?

 

Caractéristiques globales

❏ L’activité est-elle d’un niveau de difficulté adapté à l’âge et au développement des élèves ?

❏ L’activité permet-elle à l’élève de constater rapidement ses réussites, ses échecs et ses progrès ?

❏ L’activité comporte-t-elle des éléments pouvant rejoindre chacun des styles différents d’apprentissage (auditifs, visuels, kinesthésiques, etc.) ?

❏ L’activité comporte-t-elle une variété d’interactions (travail individuel, par équipes, collectif), de rythmes (convergence, divergence) et de rôles (élève acteur, observateur, communicateur, etc.) ?

❏ L’activité permet-elle de tenir compte des différents rythmes d’apprentissage ?

❏ S’assure-t-on que l’élève dispose d’un feed-back à chacune des étapes de la démarche (autocorrection, par les pairs, par l’enseignant, par la nature même de la tâche) ?

 

 La musique du jour


 

 

 

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